Le noir:
Éliane Chiron, «Loisirs de la vie moderne», colagem de imagens digitais, impressão jato de tinta sobre papel  (53x40 cm), 2015.
PDF

Mots-clés

noire
couleur
peinture

Comment citer

Lafargue, B. (2024). Le noir:: du Carré, sublime et sibérique, de Malevitch aux figures afro-américaines, pop et chaudes, de Kerry Jammes Marshall. Revista Estado Da Arte, 4(2). https://doi.org/10.14393/EdA-v4-n2-2023-72352
Share |

Résumé

Au dernier étage de La Bourse de commerce de Paris, transformée en espace d’exposition des collections Pinault par le génie architectural minimaliste de Tadao Andō en mai 2021, les peintures de Kerry James Marshall chantent la beauté du noir. Plus précisément, elles célèbrent la beauté simple, « pop » et « chaude » de personnes noires occupées aux taches de la vie quotidienne ou profitant des petits bonheurs de notre civilisation du loisir. Après plus d’un siècle de luttes violentes, de l’émancipation des esclaves en 1865 au mouvement Black lives matter en passant par les actions du Black Panther Party ou l’élection de Barack Obama en 2008 à la Maison-Blanche, le noir est devenu une couleur. Une couleur à part entière. Comment l’Invisible Man de Ralf Ellison (1952), que K.J. Marshall portraiture en masque noir grimaçant sur fond noir en 1980, et dont Elizabeth Catlett sculptera la silhouette en creux dans le mémorial Ellison de Riverside Park (New York, 2003) a-t-il trouvé son « incarnat » ? Comment le noir (du chaos des ténèbres bibliques à l’absent du disque chromatique de Newton en passant par le cachot de la Traite des nègres, les « zoos humains » ou le tabou américain de l’imprononçable « nigger ») est-il devenu une couleur comme une autre? Non plus la couleur du diable ou de ses mille avatars, mais une couleur aimable et désirable ?  L’incarnat d’une Black America aux tons chauds, lumineux, énergiques, capiteux et « pop », qui semble désireux de porter les couleurs d’un universalisme généreux, non plus monochrome ou « monotonothéiste », mais polychrome et polythéiste dans un monde-patchwork ? C’est à ces questions que je tenterai de répondre en confrontant en miroir deux grandes figures époquales, territoriales et antithétiques du noir : le sublime froid du Carré noir russe de Malevitch où transparaît la tentation d’un iconoclasme apophatique ou nihiliste, et la beauté pop et chaude des figures  afro-américaines de Kerry Jammes Marshall où chatoient les outre-noirs puissants et luisants, enjoués et tragiques de Caravage, Manet, Renoir ou Soulages. 

 

https://doi.org/10.14393/EdA-v4-n2-2023-72352
PDF

Références

ELLISON, Ralph. Invisible Man. New York : Random House, 1952

KENNEDY, Randall. Nigger: The Strange Career of a Troublesome. New York: Panthéon Books, 2002.

LEVI-STRAUSS, Claude. Tristes Tropiques. Paris : éd. Plon, 1955.

MAFFESOLI, Michel. Le temps des tribus. Paris : Éd. La table ronde, 1988.

MALEVITCH, Kazimir. De Cézanne au Suprématisme. Lausanne : Editions L'age D'homme, 1993.

MALEVITCH, Kazimir. Ecrits, tm. 1. Paris : Editions Allia, 2015.

ROLLAND-DIAMOND, Caroline. Black America, une histoire des luttes pour l’égalité et la justice (XIX-XXIe siècle). éd. La Découverte, 2016.

ROUGE, Bertrand. Pourquoi les crânes rient. Figures de l’art, Pau, n. XXXVII, 2019, p. 235-259.

Téléchargements

Les données relatives au téléchargement ne sont pas encore disponibles.